Notre corps est l’un de nos principaux moyens de communication avec les chevaux. Pourtant, bien qu’il nous soit familier, savoir utiliser son corps avec justesse, clarté et précision est plus complexe qu’il n’y paraît. Notre corps est un élément tellement évident pour nous, que nous n’avons souvent jamais pris le temps de véritablement le découvrir, ni de prendre en compte l’ensemble des informations qu’il véhicule à notre cheval… 

Les chevaux étant particulièrement sensibles au langage corporel, ils nous permettent d’en prendre conscience, et nous aident à l’apprivoiser, à l’ajuster, et à l’aligner avec ce que l’on souhaite vraiment transmettre. À travers cet article, je souhaite vous inviter à envisager le potentiel de communication de votre corps sous un nouvel angle, pour mieux comprendre toute son étendue.

Le langage corporel chez le cheval

Afin de comprendre la complexité des messages transmis par notre corps, il est intéressant de revenir sur le langage corporel des chevaux entre eux. Cette communication essentiellement visuelle s’appuie sur un ensemble de postures et d’expressions qui vont avoir pour but de transmettre des informations à leurs congénères. Un sabot qui se lève, une oreille qui se couche, des traits qui se tendent, une queue qui fouaille, chaque partie du corps du cheval aura son importance et jouera un rôle au service de la communication. Il en est de même dans leur perception du corps humain.

Souvent, quand on parle de notre langage corporel, nous avons tendance à le limiter aux simples gestes, mais en réalité il y a beaucoup d’autres facteurs à prendre en compte…

Déplacements, énergie, ancrage, émotions, expressions du visage, … Notre langage corporel est vaste, et c’est un élément très important dans nos échanges avec les chevaux. Toutefois, notre corps étant un outil qui parfois nous dépasse, il peut être nécessaire de se reconnecter à lui consciemment pour en comprendre sa multiplicité, et ainsi l’apprivoiser pour mieux communiquer.

Lorsque l’on souhaite affiner notre compréhension des chevaux, on va chercher à développer notre « lecture » du cheval, mais l’inverse est tout aussi vrai : ils nous observent et nous analysent en permanence, et généralement bien plus que ce que l’on imagine !

Les gestes

Les gestes vont comprendre l’ensemble de vos mouvements, des plus amples aux plus petits. Ils comprennent ceux que vous faites consciemment… mais également ceux que vous faites machinalement, sans forcément vous en rendre compte. Ils vont pourtant, eux aussi, envoyer une indication à votre cheval. 

Si l’on considère la précision de lecture que les chevaux auront entre eux, attentifs au plus petit geste, comme le changement d’orientation d’une oreille, même de quelques centimètres, vous comprendrez aisément que chez l’humain, le simple mouvement d’un doigt ou d’une main, même le long de notre corps, sera perçu par notre cheval. Ainsi, nous pouvons parfois déclencher des réactions chez lui, sans que nous ayons forcément eu conscience d’avoir bouger.

Et la richesse de vos gestes ne s’arrête pas là ! Un même mouvement peut se décliner de plusieurs manières, et élargir ainsi ses possibilités. Vous pourrez par exemple y ajouter des nuances au niveau de l’intensité que vous y mettrez. Cela est facilement visible lorsque l’on travaille à pied en liberté, et que l’on souhaite envoyer notre cheval sur un exercice à distance. Le cheval apprendra très facilement qu’en tenant compte de la taille ou de l’ampleur de notre geste, il pourra y associer une notion de distance : petit geste, il restera proche, geste large, il s’éloignera davantage. Et plus nous habituons nos chevaux à ce type d’exercices, plus leur lecture de notre corps s’affinera et se précisera.

Les postures

Vos postures, et la manière dont vous vous déplacez, auront également toute leur importance.

Lorsque vous allez évoluer dans l’espace, un déplacement assuré, hésitant ou maladroit, une position droite, redressée, ou à l’inverse un corps vouté ou recroquevillé, vont donner de nombreuses indications à votre cheval concernant votre état d’être, et votre état émotionnel. Cela aura un impact sur la place de référent que vous allez avoir pour lui, et sur sa façon de vous considérer. 

Dans nos postures, que ce soit à l’arrêt ou en mouvement, il y a un élément clé qui souvent nous échappe : notre ancrage physique ! C’est la capacité à se recentrer sur son corps, à en prendre conscience, et à l’installer dans l’instant présent, nous permettant de nous ancrer solidement dans le sol. Postures et ancrage sont intimement liés, car il sera bien plus difficile de se tenir droit, avec assurance et confiance, si l’on manque de stabilité. Quelqu’un d’ancré sera bien plus apaisant et rassurant pour son cheval. À l’inverse, on observera plus facilement un cheval agité, inquiet, ou encore mal à l’aise auprès d’une personne qui ne l’est pas.

De nombreuses techniques permettent de travailler et d’améliorer son ancrage, comme la pleine conscience ou encore la cohérence cardiaque. Si cela vous intéresse, c’est un sujet que j’aborde dans l’article dédié à la connexion avec son cheval (👉 « Vous souhaitez un cheval « connecté », mais vous ? L’êtes-vous vraiment ? »).

L’énergie

La notion d’énergie est peut-être l’une des plus compliquée à comprendre, et apprendre à la ressentir n’est pas évident.

En effet, contrairement aux notions précédentes, celles-ci ne se voit pas. Votre cheval va ressentir tout ce que vous allez dégager, au delà de vos gestes ou de vos déplacements. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, je ne parle pas ici de dynamisme. Cela se rapproche davantage de l’intention que votre corps va dégager, et les chevaux y sont extrêmement sensibles.

Un exemple flagrant, c’est en travail à pied, lorsqu’une personne demande une immobilité à son cheval, et tente de s’en éloigner, sans faire attention à l’énergie qu’elle dégage. Il arrive souvent qu’à ce moment-là, nous nous focalisions sur notre cheval, et la peur de le voir bouger ou s’en aller s’installe, et nous déconnecte de notre corps. Ainsi, au lieu d’envoyer une indication ancrée, posée et calme, il va justement « appeler » le cheval et l’inviter au mouvement. Cet exercice est intéressant à observer, parce qu’il nous aide à associer deux notions qui pourtant semblent opposées, réussir à être ancré.e et posé.e dans le sol… tout en se déplaçant !

Un deuxième exemple, à cheval cette fois. Vous est-il déjà arrivé de voir en concours certains.e.s, cavalier.e.s, apeuré.e.s, qui finissent par se retrouver éliminé.e.s suite au refus de sauter de leur cheval ? Leur réaction est souvent de s’agacer envers ce dernier, qui se sera arrêter malgré tous leurs efforts, mais il est intéressant d’envisager cette même scène sous un autre angle.

Lorsque l’on observe ce ou cette cavalier.e, qui tente de raisonner son cerveau, de faire taire ses peurs, et de se convaincre qu’il faut y aller coûte que coûte, quitte à se faire violence, que dira son corps selon vous ? Exactement l’inverse ! Il exprimera sans retenue ses craintes, et son envie inconsciente de ne pas y aller

Alors en prenant le temps de vous mettre à la place du cheval, vous comprendrez aisément qu’à un moment donné, si notre corps lui exprime cette peur de sauter, il est logique et normal pour lui de ne pas continuer, et que l’on ne peut pas lui reprocher de s’être arrêté, écoutant simplement ce que le corps de son ou sa cavalier.e était en train de lui demander.

Ce qui nous échappe parfois…

Le corps c’est aussi le miroir de nos émotions, il va refléter nos joies, nos peurs, nos doutes, nos tristesses ou nos colères, à travers nos postures ou nos gestes, mais aussi par des indications beaucoup plus subtiles, comme une simple expression de visage, un sourire, ou encore un regard, comme cela a été démontré par plusieurs études scientifiques (si vous souhaitez en savoir plus à ce sujet, je vous invite à découvrir les études en détails juste ici 👉 « Reconnaissance des émotions humaines par les chevaux »).

Notre corps sera aussi celui qui nous permettra de passer de la communication visuelle à la communication tactile, par notre manière d’entrer au contact du corps du cheval, de le toucher, de le caresser, d’exercer sur lui des pressions plus ou moins fines, … Tout autant d’éléments qui font de notre corps un outil de communication multiple et complexe, qui mérite que l’on prenne le temps de partir à sa rencontre pour mieux saisir la richesse de ses possibilités, et ainsi optimiser et affiner encore davantage nos échanges avec les chevaux.